LE  DOCUMENT  LE  PLUS  ANCIEN


Quel est le document « maçonnique » le plus ancien, connu à ce jour ?


C’est à notre avis, et jusqu’à preuve du contraire, un parchemin détenu par les Archives d’État de la ville de Bologne, en Italie du nord. Il porte le titre deo: Statuta et ordinamenta Societatis magistrorum muri et lignaminiso; ce qui revient à écrire, en français moderne : Statuts et règlements de la Société des maîtres du mur et de la charpente – ou, si l’on préfère, encore, de la Société, Association, Compagnie ou Confrérie des maîtres constructeurs et charpentiers… 


Au moment de la signature du document par les maîtres du mur et de la charpente d’une part, et la Commune libre de Bologne d’autre part, Louis IX, dit saint Louis, règne sur le royaume de France, pays le plus peuplé du monde chrétien. En Espagne, Ferdinand III est en passe de reconquérir les royaumes musulmans, implantés depuis le VIIIe siècle, au nom de la Sainte Église. Bologne, ville libre d’Italie, s’honore, avec ses 50 000 habitants (!), d’abriter la plus ancienne université du monde, fondée en 1088. 


Les Statuts de Bologne, c’est ainsi qu’on les nom­me communément, comprennent seize pages écrites sur parchemin. 

Datés du huitième jour d’août 1248, ils sont longs de 61 articles ; dont on peut reteniro:


• Nous statuons et ordonnons que nul maître du mur et de la charpente ne doit nuire à un autre maître de la Société des Maîtres en acceptant un ouvrage au forfait après qu’il lui a été assuré et for­mellement promis ou qu’il a eu cet ouvrage de quelque autre façon ou manière.


• Nous statuons et ordonnons que tous les maîtres qui voudront être reçus dans la Société des Maîtres du mur et de la charpente payent à la Société dix sous bolonais s’ils sont de la cité ou du pays de Bologne ; 


• Et s’ils ne sont pas de la cité ou du pays de Bologne, qu’ils payent à la Société vingt sous bolonais ;  


• Et que les officiers mettent en conscience tous leurs soins pour que tous les maîtres qui ne sont pas de la Société y soient dûment reçus. 


• Nous statuons et ordonnons que nul maître du mur et de la charpente ne doit nuire à un autre maître de la Société des Maîtres en acceptant un ouvrage au forfait après qu’il lui a été assuré et for­mellement promis ou qu’il a eu cet ouvrage de quelque autre façon ou manière. 


• Nous statuons et ordonnons que si l’un de nos sociétaires est malade, les officiers aient le devoir de le visiter s’ils l’apprennent et de lui donner aide et assistance.


• Et s’il décède et qu’il n’ait pas de quoi être enterré que la Société le fasse enterrer honorablement à ses propres frais.


• Nous statuons et ordonnons que nul membre de la Société ne doit se lever pour parler et donner son avis dans une réunion que sur ce qui sera proposé par les officiers ou le Massier. 


• Et qui y contreviendra, qu’il soit puni de douze sous bolonais.


• Nous statuons et ordonnons que personne de la Société ne doit en aucune façon ni manière prendre ni garder un apprenti pour un temps moindre que quatre ans, et [à condition de lui donner] une paire de foua­ces chaque [semaine] et une paire de chapons à la fête de Noël et vingt sous bolonais dans cinq ans. 


• En outre nous statuons que soit fait aux frais de la Société un cierge d’une livre qui devra brûler aux messes de la Société.


•Voir  : Les Anciens Devoirs (Guy Chassagnard, Éditions P. Galodé, 2014).

----------

© Guy Chassagnard 2023